» C’est quelque chose de personnel, une carte. Il n’y a pas de discours sans esthétique pour le faire passer. Et la passion n’a pas toujours de raison ». Professeur d’histoire-géographie au lycée Porte de Normandie à Verneuil sur Avre, Jean-Christophe Fichet anime depuis 7 ans « Cartolycée ». Il y a produit plus de 200 cartes pour les programmes du lycée. Un parcours unique et un site incontournable qui s’acharne à suivre la valse des programmes…
» On a notre regard d’enseignant »
280 000 visites en 2022. 320 000 en 2023. « Cartolycée » fait son chemin, preuve de l’intérêt de la démarche de J-C. Fichet. De nombreux sites de cartographie existent sur Internet Certains ont des cartothèques très importantes. Quelle est l’originalité de cartolycée ? « C’est de proposer des productions totalement originales« , nous dit JC Fichet. « On construit nos cartes. On colle davantage aux programmes et on les aborde différemment« .
« On n’aborde pas les sujets de la même façon« , nous confie J-C. Fichet. » On a notre regard d’enseignant. On a souvent un regard plus radical que celui, plus lisse, des manuels« . JC. Fichet reste admiratif de la qualité des cartes des manuels scolaires.
Il revendique « des approches qui s’écartent des supports traditionnels ». « Mon objectif c’est de proposer des cartes qu’on ne va pas trouver dans les manuels« . Très souvent, il part directement de données brutes qui sont ensuite mises en carte de façon originale. L’originalité se retrouve même dans un thème bien traditionnel, comme la carte très récente du débarquement du 6 juin 1944 avec une orientation singulière.
Le site propose maintenant de véritables séquences d’initiation à la cartographie et au croquis. « Par exemple sur la France puissance maritime nous proposons une cartographie progressive. C’est quelque chose qui ne se trouve pas dans un manuel« . La page la plus consultée est d’ailleurs celle qui publie une initiation au croquis de la mégalopole est américaine. « Les enseignants disposent d’un fonds de carte et d’une séquence pour apprendre le croquis aux élèves. Des exemples de productions d’élèves sont publiées« .
La carte support d’argumentation
La particularité du site est là. Pour J-C. Fichet, la carte est davantage un support d’argumentation qu’une illustration. « Nous offrons des cartes qui permettent de travailler avec les élèves de manière spécifique, pour une argumentation structurée à l’écrit« , nous dit-il. Cela donne des cartes fouillées qui servent de base à un travail écrit et réflexif.
Autre originalité du site : il propose à coté de la géographie (deux tiers des cartes), des cartes en histoire et aussi pour l’EMC comme la carte des morts dans la rue.
Suivre les nouveaux programmes
Cartolycée doit faire face aux changements incessants des programmes et à l’évolution du bac. « Les changements de programme compliquent l’architecture du site », nous dit JC Fichet. Ils obligent à privilégier des thèmes intouchables qui survivront aux foucades du moment. « Il ya des périodes incontournables en histoire, des thèmes indispensables en géographie« , nous dit-il. « On essaie d’avoir des approches compatibles avec des changements à venir qu’on ignore« . Cartolycée s’accroche aussi aux nouvelles modifications de programme. Parmi les cartes récentes on trouve par exemple des thèmes qui renvoient au renforcement des thèmes écologiques : la carte de la pollution aux particules fines ou celle des émissions de Co2 dans le monde.
Un besoin qui s’affirme malgré l’abandon de l’épreuve de cartographie
Le plus intéressant à observer c’est que Cartolycée progresse alors que la cartographie scolaire régresse. Le bac, revue par JM Blanquer, a perdu ses épreuves finales au profit d’un contrôle continu. Il a aussi perdu son épreuve de cartographie. « Il y a donc moins de réalisations de croquis en classe« , explique JC Fichet. « Les compétences cartographiques sont toujours attendues même si elles ne sont plus validées par une épreuve. Et les cartes sont toujours utilisées. La fréquentation croissante du site montre qu’il y a un vrai besoin de trouver des ressources en ce domaine« . Et l’utilisation de la carte comme support d’argumentation trouve tout son sens en classe.
Reste que l’avenir de Cartolycée est fragile. JC Fichet réalise la grande majorité des cartes. Des collègues y participent comme Jean-Luc Chiavarino-Mercier et Sami Rharrouz. Mais « si davantage de collègues ne viennent pas contribuer à Cartolycée, ce sera compliqué de le maintenir », prévient J-C. Fichet. Voilà c’est dit…
François Jarraud