Que va annoncer le président de la République ? Le président présente le 4 mai la réforme de la voie professionnelle depuis un lycée professionnel de Saintes qui est également un campus des métiers du ferroviaire. De source Élysée, E Macron détaillera les nouvelles missions proposées pour le pacte enseignant des PLP. Il annoncera le montant de la gratification versée aux lycéens pros. Il parlera aussi de la réforme de la carte des formations. C’est une réforme d’ampleur qui se dessine dès maintenant. En voici les grandes lignes.
Une gratification pour les lycéens pros
Cela devait être progressif. Finalement Emmanuel Macron accélère. A l’Elysée on parle « d’un investissement massif » dans les lycées professionnels. On veut en faire « une voie d’excellence » tout en adaptant les établissements aux besoins locaux. Des propos déjà entendus à chaque réforme de la voie professionnelle, comme le rappelait récemment Daniel Bloch, le fondateur du bac pro. Le 4 mai, Emmanuel Macron est au lycée Palissy de Saintes (17). A l’Elysée on dessine déjà ce que sera la réforme.
La réforme de la voie professionnelle poursuit trois objectifs. Le premier est la lutte contre le décrochage des lycéens professionnels. Selon l’Elysée, cela commencera par la découverte des métiers instituée dans les collèges dès la 5ème à la rentrée prochaine. Il reste encore un grand flou pour savoir qui organisera et réalisera ces après midi spécifiques. Mais E Macron devrait surtout mettre en valeur la gratification qui sera versée aux lycéens professionnels dès la rentrée 2023. L’Elysée en attend « un choc d’attractivité » à la fois pour les lycéens et pour les entreprises qui les recevront. On n’en connait pas encore le montant. Mais il devrait varier selon l’âge des lycéens. La lutte contre le décrochage aura aussi un versant pédagogique en lien avec les nouvelles missions des enseignants dans le cadre du pacte.
La réforme de la carte des lycées professionnels
Le second objectif donné par l’Elysée à la réforme est l’insertion professionnelle des lycéens des LP. Pour l’améliorer, l’Elysée confirme des fermetures et ouvertures de formations, c’est-à-dire une révision de la carte des formations. « On ne va pas décider cela depuis Paris« , affirme l’Elysée. La présidence mise sur des concertations locales auxquelles seront associés tous les acteurs. Et on précise : enseignants, élèves et entreprises. Curieusement les collectivités territoriales sont oubliées… Il s’agit d’adapter l’offre de formations « aux besoins d’aujourd’hui et de demain » des entreprises locales.
L’Elysée parle aussi de renforcer l’insertion dans le supérieur. Concrètement il est question d’améliorer le taux de réussite en BTS des lycéens professionnels. Des tentatives ont été faites dans le passé d’une année passerelle sans grande réussite, cette année n’offrant pas de garantie pour les jeunes d’entrer en BTS. Globalement les deux propositions élyséennes prendront elles vraiment en charge les vœux des jeunes ? On l’affirme à l’Elysée. Mais ce serait une vraie révolution dans une voie où l’orientation par défaut est la règle et où on a tout fait pour recaler les lycéens professionnels à leur entrée dans le supérieur.
Augmenter les stages ou renforcer les fondamentaux ?
On touche à aussi à un point resté obscur de la réforme. L’Elysée affirme vouloir à la fois augmenter la durée des stages en entreprises et renforcer les apprentissages fondamentaux. La concertation n’a pas réussi à trouver la solution à ce dilemme. » Il y a absence de consensus sur l’augmentation de 50% des périodes de formation en milieu professionnel sur toutes les années de formation« , avait dit C Grandjean en janvier 2023 à l’issue de la « concertation« . « Ce qui fait consensus c’est que comme (les élèves) sont plus jeunes ils ne sont pas assez matures pour bénéficier de ces périodes de formation. Cette augmentation de 50% à tous les niveaux n’est pas forcément aussi indispensable que cela… Certaines autres modalités pourraient être aussi enrichissantes pour permettre une augmentation peut-être sur une dernière année ou d’autres moments par exemple post bac ou post cap. On va travailler les modalités« . E Macron devrait trancher ce nœud gordien.
Les nouvelles missions des enseignants
E Macron devrait aussi faire des propositions pour « reconnaitre l’engagement des enseignants » des lycées professionnels. Pour l’Elysée, cela passe obligatoirement par le pacte enseignant, c’est-à-dire la rémunération de travaux supplémentaires pour les enseignants qui veulent et surtout peuvent en faire. Bien entendu on attend des PLP qu’ils assurent des replacements de courte durée comme leurs collègues des lycées généraux et technologiques. L’Elysée annonce aussi des missions concernant la maitrise des fondamentaux. S’agit-il de proposer aux élèves des heures de français et de maths faites en plus et indépendamment des cours ? Si c’était le cas on pourrait douter de l’efficacité de ce dispositif. Les lycéens pros ont déjà des semaines très chargées. Et l’aide conçus à part des cours est rarement efficace.
L’Elysée annonce aussi des missions pour faire le lien entre le lycée et les entreprises. Pourraient être reconnus le suivi des stages, la communication avec les entreprises, des missions qui son déjà exercées par les professeurs des lycées professionnels. Le président devrait aussi annoncer dans ces missions la prise en charge de la mixité des publics. Avoir en classe des apprentis et des jeunes sous statut lycéen génère beaucoup de travail et c’est un point chaud de la réforme. L’Elysée tient à cette mixité. Les syndicats y sont opposés.
Exfiltrer la voie professionnelle ?
Le calendrier de la réforme reste encore à préciser. Dès la rentrée 2023 les lycéens professionnels toucheront une gratification pour leurs stages et les enseignants seront rémunérés quand ils accepteront les missions du pacte. La réforme de la carte des formations, qui implique des décisions des régions, sera forcément plus longue. A l’Elysée on précise que la mise en place de la réforme pourrait durer jusqu’en 2026.
Mais il y a aussi la façon de faire. A l’Elysée on affirme que l’essentiel se fera par voie réglementaire. En clair une partie de la réforme pourrait passer par la voie législative. Et là on rejoint une inquiétude de l’intersyndicale. Fortement mobilisée depuis l’automne, elle a réussi jusque là à bloquer la réforme. Sa relance par E Macron et son annonce de la placer dans le cadre d’une loi Travail inquiète les organisations. » S’il a besoin d’une loi, c’est qu’il envisage le basculement complet de la voie professionnelle scolaire vers le ministère du travail« , nous confiait S Gérardin, co secrétaire générale du Snuep Fsu il y a quelques jours. « Cela signifie basculement du statut des élèves, du statut des profs et certainement des grosses modifications des diplômes professionnels. Ils disent depuis longtemps qu’ils veulent en finir de cette société de diplômes… Ce gouvernement renonce à une mission essentielle de service public qui est de former tous les jeunes dans l’école« . Quelle réponse E Macron apporte-il à ces questions ?
François Jarraud
Le résultat de la concertation
Virage alarmant pour la réforme
L’insertion professionnelle au regard de la recherche