Le ministère de l’Éducation nationale retire un projet de décret créant la première indemnité du Nouveau Pacte. Ce texte créant une indemnité pour mission d’innovation pédagogique devait être présenté en comité technique ministériel le 13 décembre. Les organisations syndicales ont obtenu son retrait. Elles se félicitent de ce recul ministériel. Et expliquent leur opposition.
Le nouveau pacte et la revalorisation conditionnelle
« Il y aura une partie inconditionnelle et un nouveau pacte pour les enseignants… où on proposera des taches nouvelles ». En juin 2022, à Marseille, laboratoire des innovations pédagogiques voulues par le président de la République, Emmanuel Macron avait confirmé que la revalorisation des enseignants comprendrait une partie optionnelle liée à l’acceptation de nouvelles missions. C’est « le nouveau pacte » qui doit permettre d’augmenter les salaires jusqu’à 20%. En octobre, Pap Ndiaye avait commencé à énumérer ces nouvelles missions.
Le projet de décret
Un projet de décret, présenté par le ministère aux organisations syndicales en vue du comité technique ministériel du 13 décembre, annonce la création d’une « indemnité pour mission d’innovation pédagogique ».
« Le décret institue une indemnité allouée aux personnels relevant du ministère chargé de l’Éducation nationale exerçant dans les écoles, les EPLE et les établissements d’enseignement privé sous contrat à l’exception des personnels d’encadrement, intervenant dans un projet relevant du fonds d’innovation pédagogique. Le montant de l’indemnité prend en compte l’importance effective et les conditions d’exercice de la mission concernée ». Selon l’article 2, « Le recteur d’académie détermine les décisions individuelles d’attribution de cette indemnité », il décide donc seul quelles innovations seront soutenues. Celles-ci doivent, selon le projet de décret, s’inscrire dans le fonds d’innovation pédagogique, crée par le ministère pour l’École du futur voulue par E Macron.
Un projet d’arrêté prévoit plusieurs montants pour la prime annuelle allant de 250€ à 1500€. On est assez loin des 20% annoncé par le gouvernement. Mais il inclut peut-être dans son calcul toutes les augmentations depuis 2022, y compris la hausse du point fonction publique.
Des syndicats vent debout
« Voici que le gouvernement propose de rémunérer les enseignants qui s’inscriraient dans sa démarche », écrit le Snalc. « En gros, il essaye d’acheter les collègues pour pouvoir se vanter de la réussite de son fonds d’innovation ». Pour Jean-Rémi Girard, président du Snalc, c’est d’autant plus regrettable que les fonds manquent pour financer les missions actuelles. « Les projets pédagogiques, on n’a pas à être payés pour cela, c’est la base du métier », nous dit-il.
« Le fonds d’innovation pédagogique porte des dangers », nous dit Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes Fsu. « Il s’agit de remodeler le métier et de faire entrer la profession dans une concurrence ». Le Snes se félicite de mener campagne contre l’École du futur et ces nouveaux projets. « On est entendu : peu d’établissements se lancent », nous dit-elle. Selon le ministère, 10% des écoles et établissements seraient entrés dans les concertations liées à l’École du futur ou auraient annoncé vouloir le faire. 90% résistent. Le Snes Fsu craint « la mise en concurrence des personnels à un moment où on a besoin de collectif ».
En réponse à l’envoi du texte, les syndicats ont refusé de siéger à une réunion prévue le 6 décembre. Le ministère leur a annoncé le retrait du projet de décret de l’ordre du jour du CTM du 13 décembre. Le Nouveau Pacte recule…
François Jarraud